Comme à chaque matin, je marche tranquillement et paisiblement vers l’arrêt d’autobus pour me rendre à mon travail. Je suis d’une fatigue épouvantable parce que j’ai regardé le match hier soir. Je suis bien content de la tournure des événements. Boston a triomphé devants les Flyers 5-1. Belle game! Bref, je me suis couché tard et je suis fatigué. J’attends quelques minutes en me remémorant la belle époque des Nordiques. Tous les buts marqués, toutes les batailles avec le Canayien.
Quand l’autobus arrive, je rentre tranquillement, salut gentiment le chauffeur, et je vais m’asseoir dans le 4e rang, bien au fond. Un arrêt (ou peut-être 2) plus tard. Un jeune homme entre dans l’autobus. Le genre de personne que tu ne veux pas rencontrer : UN ADOLESCENT! Peut-être pour faire mon brave, je le regarde pendant qu’il fait 1, 2 et 3 pas dans ma direction. Il s’arrête à côté de moi, met sa main dans une de ses poches. Ma gorge se serre. « IL VA SORTIR UN COUTEAU !!! » me dit-je. Tranquillement, l’adolescent sort son cellulaire et commence à jouer avec dans le banc derrière moi. Je me rappelle son visage plein de boutons, ses pantalons baissés jusqu’aux genoux, sa veste faite beaucoup trop grande pour lui. Je revois encore ses écouteurs blanc, ceux que j’ai vu tant de fois. On dirait que tout le monde a sa, des écouteurs blancs. Et il est assis derrière moi! IL VA SORTIR UN COUTEAU, JE LE JURE!!!
Les arrêts passent et se défilent. Je le regarde dès que je peux, sans qu’il s’en aperçoive. Je regarde ma montre : 7 : 50! Je suis en retard en plus! C’est de sa faute, à l’adolescent! Merde et Merde! Bon tranquille, le travail est dans à peine 2 arrêts. Et je déteste ce travail! Rien de plus ennuyeux que de surveiller des morveux de secondaire 3 qui font des math. Et c’est mon arrêt! Soulagé, je sors de l’autobus, fait quelque pas vers l’école et m’aperçois que l’ADOLESCENT EST À CÔTÉ DE MOI !!! Mais non, c’est impossible, les ADOLESCENTS comme sa ne vont pas à l’école, ils vont fumer n’importe où, mais ils ne vont pas à l’école. Oh non! Une idée effleure ma pensée : Si cet ADOLESCENT à côté de moi était dans ma classe... J’ai trouvé : Je l’expédie vite fait bien fait faire des copies au local d’encadrement... Et il est encore à côté de moi! IL VA LE SORTIR, SON COUTEAU!!! Je le regarde encore : Toujours autant de boutons, un petite barbe qui commence à sortir, ses écouteurs blancs, ses pantalons, sa veste, et son COUTEAU dans sa poche!!!
J’essaie de le semer, mais j’aurais l’air assez fou si je commençais à courir, et je ne peux pas ralentir, il m’a mis EN RETARD!!! Je le regarde encore du coin de l’œil : Toujours aussi boutonneux, toujours les pantalons, la veste, les écouteurs blancs et sa petite barbe mal rasée, mais cette fois-ci, je vois autre chose : Un sourire. Pas un sourire du style « baveux » comme tous les adolescents, un sourire du genre « sourire ». Mais c’est IMPOSSIBLE!!! LES ADOLESCENTS, ÇA NE SOURIT PAS!!! Depuis quand les ADOLESCENTS sourient!!! J’arrête de le regarder, je fixe mon objectif : L’École s’approche, je l’aperçois, je la voie sa forme, je vois ses petits détails maintenant et je touche finalement la poignée froide et humide de l’école, je l’ouvre en laissant passer l’ADOLESCENT devant moi. Je suis brillant! Et maintenant, il est DEVANT moi!
Fier de moi, je vais porter mon manteau à la salle de professeur. Je demande mon local à la secrétaire : Local 353, Remplace Mr. Renaud en math. Elle me dit qu’il est absent pour minimum un mois : Un de ses proches est mort. Bon, du travail pour un mois = Un séjours à Montréal pour voir un match de hockey + quelques parties des Olympiques de Gatineau + arrondir les fins de mois = Je suis gagnant. Je me dirige vers le local 353. Quelques étudiants sont près du local. Je leurs ouvre la porte et ... NON!!! L’ADOLESCENT EST LÀ!!! MAIS C’EST CATASTROPHIQUE!!! VITE, IL FAUT L’ÉLOIGNER DE MOI, L’ÉLOIGNER DE MOI!!! Bon, c’est vrai que j’y avais pensé, mais au point que sa arrive... Encore trouvé la même idée! : Je l’expédie vite fait bien fait faire des copies au local d’encadrement... Bon, reste juste à trouver une excuse pour l’envoyer là-bas. « Il va faire un faux pas, regarde le! » dit ma petite voix dans ma tête. Et elle à raison, finalement.
Quelques douloureuses secondes plus tard, la cloche sonne et fait résonner un bruit strident. Un mot : horrible... J’aurais plutôt mis un bruit ressemblant à la sirène quand il y a un but à Montréal. Bref, la cloche sonne et cela équivaut au début du cours. Quelques retards, on va laisser passer, ce n’est pas l’ADOLESCENT. Je prends les présences :
- Alexis Vaillant ?
- Oui
- Xavier Cardinal ?
- Présent
- Félix Laveault-Allard ?
Et c’est l’ADOLESCENT qui répond « Oui ». Le problème, c’est qu’il avait une voix positive, énergétique. Je le déteste, cet ADOLESCENT!!! En plus d’être ce genre de personne, regardez son nom : Terne, compliqué, sans originalité, mais sans être un nom de base. Bon, j’aurai une bonne raison d le sortir plus tard. J’explique le travail à faire et j’ouvre mon bouquin : tome 2 La LNH: un rêve, possible de Luc Gélinas. Soudain, j’entends une voix, aucun doute, l’ADOLESCENT! Merde, c’est un autre élève. Je lui dis de se taire et je continu ma lecture.
20 minutes avant la fin du cours, l’ADOLESCENT est toujours là. Mais je suis plus détendu maintenant, il n’est pas le genre de personne que j’aurais pensé. Il n’a pas encore dit un mot. Et enfin, il se lève, vient vers moi, met sa main dans sa poche et SORT UN COUTEAU!!! Non, pas vrai, il me demande s’il peut aller chercher un livre dans son casier tout en m’assurant qu’il a finis son travail. Réjoui d’avoir enfin un congé de l’ADOLESCENT, je m’empresse de l’expédier hors du local 353. 2 minutes de pur bonheur, du soulagement, jusque vient le temps où l’ADOLESCENT vient se positionner devant la vitre pour que je le laisse rentrer. Mes jambes sont molles, je ne vais pas ouvrir, je ne VEUX pas! Ma gorge est serrée, il faut que j’y aille!!! Je le regarde, il me regarde le regarder en disant « Qu’est ce qu’il fait, ce vieux crouton? ». IL VA CASSER
FENÊTRE, ENTRER ET SORTIR SON COUTEAU!!! Et une fille va ouvrir la porte avant de s’asseoir en silence. OUF!!! Calme toi, Calme toi, il reste à peine 15 minutes à endurer cela. Il passe devant moi, regarde sur le bureau, et me demande en chuchotant :
- C’est vous qui lisez cela ?
- ...Quoi?
- C’est vous qui lisez cela ?
- ...Lire quoi ?
- LNH : un rêve, possible
- ...oui, enfin, oui c’est moi, j’adore le hockey
- Moi aussi!
Et il retourne à sa place, au fond de la classe. Je le regarde, oubliant tous ce que j’ai vu tout à l’heure. Je ne vois plus ses pantalons aux genoux, sa veste n’est plus si grande que cela, il a beaucoup moins de boutons, sa barbe est rasée bien correctement. Je ne lis plus, mon livre est ouvert, mais je ne lis plus. Lui il lit, il lit quoi? Il lit... LNH : un rêve, possible? Oui, c’est cela. Et Il se lève, il se lève pour faire quoi? Il se lève pour enlever sa veste, oui c’est cela. Et ce que je vois, c’est un jeune homme, plus un adolescent, qui aborde fièrement un chandail des nordiques. Je ne vois plus rien d’autre que son chandail, et je me dit : Tu prend le même autobus demain matin!